Homélies

Paroisse Saint Pierre - Saint Paul

Les homélies du père Emmanuel Albuquerque

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Homélie du 2 février 2025

Quelque chose à offrir

Pourquoi Siméon peut-il reposer en paix ?

Car, enfin, il sait comment offrir une offrande qui soit agréable à Dieu ! Les parents amènent des animaux pour l’offrande, mais Siméon prend Jésus. Je sais bien que ce n’est pas pour l’offrir en sacrifice, mais c’est un peu ce qui pourrait venir à l’esprit quand on connaît la suite de l’histoire ! Nous savons nous que c’est bien cet enfant qui sera offert en sacrifice sur la croix, et lors de nos messes. A la place des Joseph je dirais : « Holà vieillard, rends-moi cet enfant, ne va pas faire de bêtise ! ».

Dans la loi juive, on rachetait les premiers-nés masculins en souvenir de la sortie d’Égypte. Tous les premiers-nés égyptiens meurent dans la nuit qui précèdent le départ. Depuis ce temps tous les premiers-nés appartiennent à Dieu : pour ne pas les tuer, on les rachète avec des animaux. C’était l’ancienne alliance. Voici venir la Nouvelle Alliance dans laquelle il faudra, pour la libération, le premier-né de Dieu : Celui qui s’avance aujourd’hui dans le temple.

 

Détaillons un peu. Cet événement est l’accomplissement de la première lecture : le peuple attendait qu’enfin Dieu habite pleinement dans son temple.

Toute l’histoire avait commencé avec la tente de la rencontre dans le désert, avec l’arche d’alliance dans laquelle on mettait les tables de la loi, de la Manne. Puis était venu le temple. Voici désormais une nouvelle étape, Jésus, Dieu, entre dans le Temple pour que le temple soit vraiment le lieu de la rencontre entre Dieu et l’homme. La lumière descend sur terre.

Mais cette première lecture précise quelque chose d’important : Dieu descend afin que l’homme soit purifié, et qu’il puisse offrir un sacrifice qui plaise à Dieu.

 

Bon ça a donc l’air important. Je crois que, nous, ce n’est pas une question qu’on se pose tous les jours : « Est-ce que mon offrande plaît à Dieu ? Euh, je devrais me poser la question ? »

Et pourtant certains ont tué pour ça ! Souvenez-vous, le premier meurtre de l’histoire de l’humanité : Caïn tue Abel. Pourquoi ? Car l’offrande d’Abel a plu à Dieu, mais pas la sienne.

Dans une relation, vous voulez avoir quelque chose à offrir. Et, dans de nombreuses religions, les hommes offrent des sacrifices aux dieux, conscients qu’il faut avoir quelque chose à présenter, quelque chose qui a de la valeur.

Mais depuis le péché, l’homme ne sait plus comment s’y prendre, la relation avec Dieu est coupée : rien de ce qu’il offre ne convient. Dieu lui dit même parfois, qu’il n’en peut plus de ces sacrifices de béliers, mais qu’il veut qu’il offre son cœur contrit.

 

Et voilà que Jésus entre dans le temple. Il est mis dans les bras de Siméon pour qu’il ait quelque chose à offrir. Je parle ici surtout de manière symbolique. Mais c’est notre cas à nous en tout cas !

L’Esprit Saint nous pousse nous aussi à venir dans ce temple, comme Siméon, c’est lui le premier qui veut nous rencontrer. Il veut reposer dans nos bras, dans une intimité bouleversante. Prenons le temps d’accueillir Jésus dans nos mains, dans notre bouche, à la manière de Siméon.

Il se donne à nous pour que nous puissions l’offrir au Père et que nous soyons ainsi purifiés.

Notre offrande plaît à Dieu, car nous l’offrons en étant purs.

Notre offrande plaît à Dieu car il aime celui que nous lui offrons : Jésus.

 

Dernière chose : à quoi sommes-nous donc entraînés ? A offrir notre vie à Dieu nous aussi, comme Jésus.

Celui qui veut recevoir Dieu Tout entier, se donne tout entier. Les époux connaissent ça par cœur. Au jour de leur mariage, ils disaient : « Je te reçois, et je me donne à toi ».

Avec Dieu, au cours de cette messe, c’est la même chose : un sacrifice où chacun donne ce qu’il est pour créer la communion.

 

Deux questions :

Est-ce que je remercie Dieu de m’avoir mis dans les bras, Jésus, l’offrande qui me purifie et qui est agréable à Dieu ?

Comment est-ce que j’offre ma vie, ce qui fait ma vie, à Dieu ?

Marc Burtschell

Homélie du 26 janvier 2025

Un seul corps

Nous ne formons qu’un seul corps. St Paul s’adresse à une communauté qui pourrait risquer de se diviser, et il lui adresse alors cette belle comparaison avec le corps humain. C’est l’occasion pour nous d’évoquer le beau sujet de ce qui nous unit, et d’aborder aussi le thème de la synodalité, que notre diocèse a travaillé lors du rassemblement des différents acteurs pastoraux le 17 et 18 janvier.

St Paul aurait pu déclarer que certaines personnes ont des rôles qui méritent un respect supérieur. Il est important de noter qu’il affirme au contraire que l’unité prévaut.

Ainsi nous avons un seul Esprit, un seul corps : il n’y a pas plusieurs baptêmes, un pour les évêques, un autre pour les autres, mais un seul.

 

De même, St Paul insiste pour dire que tous ont besoin de tous : il est important à nouveau de remarquer qu’il aurait pu faire le choix inverse. Il aurait pu insister pour dire que l’on a plus besoin de la tête et du cœur que d’une main. Non, au contraire il écrit que la tête (même la tête) ne peut pas dire aux pieds qu’elle n’a pas besoin d’eux.

Nous sommes donc d’abord des baptisés, ensemble, des frères et sœurs, tous, et c’est le plus important. Le pape François rappelle cette réalité en écrivant : « Le Concile Vatican II affirme : « (...) les laïcs ont pour frère le Christ, [...] ainsi ils ont aussi pour frères ceux qui (...) font près de la famille de Dieu office de pasteurs » (LG 32). Frères avec le Christ et frères avec les prêtres, frères avec tous. » »

 

A nous qui sommes parfois tentés d’être jaloux de ce que sont les autres, St Paul rappelle que c’est une bénédiction que nous soyons différents, car sinon le corps ne pourrait exister. Et il explique que normalement la place que chacun occupe lui est attribué par l’Esprit. Cela nous encourage à nous émerveiller de ce que nous sommes nous et de ce que sont les autres. Dans un corps, il n’y a pas de membres inutiles. Les dons de chacun sont au service de tous les autres. Quelqu’un chante bien, c’est pour tous les autres qu’elle chante, etc.

 

Je n’ai pas l’impression de dire des choses très extraordinaires, mais je crois qu’il est bon de nous en souvenir néanmoins. Il est bon d’être réunis ensemble : hommes et femmes, de tous pays, de différents milieux, de différentes éducations, prêtres ou laïcs, mariés, consacrés dans le célibat, jeunes ou plus âgés. Tous frères et sœurs ! Chacun appelé à prendre la place qui est la sienne.

 

C’est là tout le thème du synode sur la synodalité. Qu’en est-il ressorti ? Quelles sont les perspectives pour nous, maintenant ? Pour ceux qui n’ont pas lu le document final du synode, voici quelques points pour nous aider à comprendre concrètement les beaux enjeux qui attendent l’Église pour les années à venir.

 

1. Les relations. « Tout au long du parcours du Synode, et sous toutes les latitudes, une recherche s’est fait jour : celle d’une Église davantage capable de nourrir les relations – avec le Seigneur, entre hommes et femmes, dans les familles, dans les communautés, entre tous les chrétiens, entre les groupes sociaux et les religions, avec la création. » Dans une époque très individualiste, même les croyants peuvent voir leur salut comme une question personnelle. Non : le salut passe par les relations.

 

2. Un discernement qui fait de la place à chacun. C’est ainsi que l’on entend l’Esprit Saint parler. Il y a la nécessité qu’un consensus se forme avec la communauté, grâce à l’apprentissage de nouveaux processus de consultations et de décisions. C’est pourquoi notre évêque prend beaucoup de temps avant de donner les orientations diocésaines : il se donne les moyens d’écouter ce que chacun a à dire. Au 1er millénaire, on disait dans l’Église : « Ce qui concerne tout le monde doit être décidé par tout le monde ».

 

4. Plusieurs paragraphes concernent les prêtres et les évêques. Ils rappellent à la fois qu’il ne faut pas les idéaliser, mais que ce sont des frères fragiles qui ont « besoin d’aide comme tout le monde ». D’autre part, ils détaillent le besoin qu’évêques et prêtres rendent compte de leur mission à leur communauté, au lieu de considérer qu’ils n’ont des comptes à rendre qu’à leur supérieur. Car ils ne sont pas « isolés ou situés au-dessus du reste du peuple de Dieu ». Non, nous sommes tous frères et sœurs !

 

Je m’arrête là. Je pense que personne ne mesure encore vraiment aujourd’hui comment ces idées-là vont bouleverser l’Église pour de nombreuses années à venir ! C’est un changement profond qui arrive.

 

Concrètement, deux questions pour finir :

Ne m’arrive-t-il pas parfois de négliger la qualité de mes relations avec les autres, pour que mes projets, mes intérêts, avancent (par exemple) ?

Comment faire de la place à plus de relation à l’autre dans ma vie, à partir du cœur ?

Marc Burtschell

Homélie du 18 janvier 2025

Vous êtes invités !

Commençons par regarder la délicatesse et l’humilité de Jésus.

Jésus permet que le vin soit gardé jusqu’au bout. Il aurait pu se contenter d’un vin de moins bonne qualité, car les gens ont déjà bu : c’est ce qui se passait souvent. Mais non. Il aurait pu mettre un vin meilleur, mais alors le maître de maison aurait senti qu’il s’est passé quelque chose d’anormal, et tous les invités avec. Le marié aurait été obligé d’expliquer qu’ils n’avaient pas prévu assez : ça aurait été la honte pour lui et la gloire pour Jésus qui serait apparu comme le héro de la soirée. Mais non.

C’est le même bon vin qui est préservé. Le maître de maison ne sait pas que cela vient de Jésus, sinon il n’aurait pas remercié le marié. C’est donc un vrai service rendu discrètement au marié, à sa gloire à lui, non à celle de Jésus.

Les seuls témoins de la scène sont semble-t-il, les serviteurs et les disciples qui sont les seuls à croire en Jésus et à qui sa gloire est manifesté.

 

Nous sommes au premier miracle de Jésus, c’est le troisième jour depuis son baptême, c’est-à-dire depuis que sa mission a commencé. Le premier miracle dit forcément quelque chose sur tous les miracles.

Et alors, ça donne quoi ? Jésus est venu pour que nous ayons la vie en abondance, il est venu pour que la fête continue !

Nous sommes dans des circonstances ordinaires, d’un mariage, nous ne sommes pas au temple, dans un temps de prière. Jésus est venu à cette invitation, il a le temps pour ces événements de la vie. Et là il transforme de l’eau en vin.

Heu, combien exactement d’eau en vin ? 600L environ, soit… 800 bouteilles de vin ! Même pour un mariage où les gens boivent déjà pas mal (soit une demi bouteille par buveur), c’est une quantité qui conviendrait pour au moins 2000 personnes (avec les non buveurs) !

 

Voici le premier miracle de Jésus : c’est pas fou ? Cela percute tellement nos a priori.

Nous aurions attendu quelque chose peut-être plus comme ça : « Ceux qui ont bu en ont déjà bien assez, je vois. Je ne veux pas être responsable de l’ébriété générale. »

Voilà quelqu’un de sérieux, de moralement impeccable, quelqu’un de tellement spirituel ! Voilà qui nous aurait beaucoup moins surpris. Mais franchement, vous préférez quoi ?

Jésus vient toucher notre cœur par cette surabondance.

 

Pourquoi Jésus répond-il que ce n’est pas encore son heure ? Car il pense au jour où il multipliera le vin encore plus. Il pense à d’autres noces... Jésus pense à la messe, quand il donnera le vin qui est son sang sur la planète entière, à toutes les heures du jour et de la nuit : son sang pour que la fête continue.

Voyons-nous la messe ainsi : que la fête continue dans ma vie ?

Et il pense au ciel où ces noces seront parfaitement conclues : « je ne boirai plus du fruit de la vigne jusqu’à ce que le royaume de Dieu soit venu ». Avec humour, on pourrait dire : « Il ne pense qu’à boire ! ». Eh oui, cette alliance avec nous est son grand désir !

Nous sommes la mariée (qui est absente dans ces noces).

 

Comme les mystères que nous vivons sont beaux ! Il n’y a pas longtemps, c’était la beauté de la crèche, puis la beauté de ces mages qui viennent de loin, puis la semaine dernière, la beauté du baptême qui vient purifier le monde. Aujourd’hui, c’est la fête d’un mariage, comme une autre manière encore de résumer toute la vie chrétienne et tout le but de Jésus en venant sur terre.

Il nous propose une alliance fêtée avec les bonnes viandes, le vin succulent. Pensez au retour du fils prodigue, c’est cela : la danse, le veau gras. La fête ! Pas d’abord, la prière au temple, le chapelet et l’adoration. C’est tellement incarné ! Ça nous fait drôle. Et c’est tellement attirant alors !

 

Conclusion :

Recevons avec stupéfaction et émerveillement cette invitation aux noces qui nous est personnellement adressée !

Une question : est-ce la fête dans nos vies ? Comment pouvons-nous la cultiver avec l’aide de Dieu ? Si le vin vient à manquer, alors comme Marie : présentons nos manques à Dieu dans la confiance.

Exemple : lors de vacances avec un couple d’amis, je demandais à Dieu son aide pour que nous passions une bonne après-midi. Et nous sommes tombés sur une petite plage déserte qui a permis un très bon moment. C’est s’arrêter, demander à Dieu et chercher avec lui : nous pourrons être surpris de ce qui se passe.

Marc Burtschell

Homélie du 12 janvier 2025

Grandeur du baptême

Jésus est le premier Homme (sauf Marie) à qui le Père peut adresser ces paroles sans rien nuancer. Le Père trouve sa joie en Jésus, car il est sans péché, car cet homme aime parfaitement. Bien sûr que le Père aime les autres hommes, c’est pourquoi il leur envoie son Fils, afin qu’un jour il puisse le dire aussi de tous les hommes. Quel jour ? Celui de leur baptême !

Jésus est le premier Homme (sauf Marie) sur qui l’Esprit Saint peut descendre entièrement, pour la même raison. Le péché ne peut cohabiter avec l’Esprit Saint car il est saint justement ! Bien sûr que l’Esprit Saint voudrait pouvoir descendre sur tous les hommes, mais justement, c’est ce que Jésus est en train de rendre possible !

 

La mission de Jésus commence avec ce nouveau baptême, comme s’il ne venait que pour ça : que le baptême existe, et que nous soyons sauvés.

Vous voyez la grandeur du baptême ! Nous ne connaissons pas d’autres moyens d’être sauvés. Parce que nous ne connaissons que le Christ qui puisse nous sauver, c’est la raison.

Et alors, ceux qui n’ont pas entendu parler de l’Evangile ou de l’Église ? L’Esprit Saint offre à tous la possibilité d’être sauvé, répond le catéchisme de l’Église catholique.

 

Mais cela ne doit pas nous empêcher de proposer généreusement le baptême à tous, au contraire ! Jésus lui-même nous a ordonné de baptiser et il a affirmé que sans le baptême « nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu » (Jn3,5).

Peut-être peut-on dire ceci pour essayer de montrer la différence.

Imaginez qu’on vous dise « Dieu vous offre la possibilité d’être sauvé ». Oui, mais concrètement vous pouvez vous demander : « Euh, mais alors je vais être sauvé ou pas, car c’est flou votre histoire ! »

Alors qu’avec le baptême, il n’y a plus de doute ! Vous êtes devenus enfant de Dieu, le Père vous dit : « Tu es mon fils / ma fille bien aimé, en toi je trouve ma joie », et vous recevez l’Esprit Saint. Bien sûr, il faudra encore rester fidèle à son baptême, mais la situation est tout de même bien différente.

 

Ce que je trouve très beau dans le baptême de Jésus est de voir à quel point c’est concret. Il a pris un corps d’homme, et c’est par ce corps d’homme qu’il s’est fait solidaire de tous les hommes. Il a dû être plongé dans l’eau. Sans eau pas de baptême : étonnant non ? Nous aurions imaginé peut-être quelque chose de plus ‘spirituel’ (soit disant), de plus ‘désincarné’. St Maxime de Turin dira que, par son baptême, Jésus purifie les eaux de la terre entière en vue du baptême. Au commencement de la Bible, l’Esprit plane sur les eaux, avec Jésus cet Esprit revient sur l’eau : nous assistons à la recréation du monde, cela touche toute la création. Il est beau de considérer ce salut qui renouvelle toute chose.

 

Et cela nous amène donc à considérer comment nous aussi nous offrons tout ce que nous sommes à Dieu : notre corps, notre esprit, mais aussi tous les objets, les éléments dont nous avons l’usage. La création tout entière doit être apportée à Dieu par les enfants de Dieu que nous sommes : c’est notre rôle de baptisés ! Que par notre travail, tout serve à faire grandir le bien, que tout soit offert à la gloire de Dieu. C’est cela que nous faisons quand nous venons à la messe !

Voici ce qu’écrit Carlo Acutis : "On doit placer la vie quotidienne sous le signe du baptême. Vivre sous ce signe, c'est goûter un autre air, un autre climat, habiter une autre région. À condition de faire siens ces idéaux, l'évangélisation se pare de nouveauté et renouvelle. On parle beaucoup de "nouvelle évangélisation". Voilà ce qu'elle est. Et rien d'autre !"

Il veut dire que nous ne devons pas d’abord chercher à faire plein de choses mais à entrer dans la nouvelle identité que nous avons reçu. C’est nous qui devons changer et alors tout change !

Carlo vivait de manière ordinaire, mais ça rayonnait de manière extraordinaire.

Demandons-lui cet émerveillement devant la grandeur du baptême : je suis fils ou fille de Dieu ! Demandons-lui de savoir regarder la vie autrement et de vivre en conséquence, avec cet amour, cette prière, ce souci des autres que l’on attend d’un baptisé.

Marc Burtschell

Homélie du 4 janvier 2025

Hors de la zone de confort

Quelle aventure, la vie de ces mages ! Qui n’aimerait pas avoir vécue cela avec eux ?

Nous avons par eux, un rappel important de cet aspect de la vie chrétienne. Dieu aime les courageux, ceux qui sont capables de prendre des risques.

Non, la vie chrétienne n’est pas une recette, ennuyeuse à mourir. Il ne suffit pas d’obéir aux commandements de Dieu d’une manière mécanique : ne pas tuer, ne pas voler, et voilà.

Heureusement !

L’étoile de la nuit de Noël brille pour tout le monde, mais quelques uns seulement feront la route et trouveront l’enfant. Encore faut-il comme ces mages attendre une nouveauté, garder les yeux fixer sur le ciel et non par terre, juste devant soi. Encore faut-il comme eux, espérer que le bien vient.

 

La vie chrétienne suppose de se mettre en mouvement, et d’oser risquer. Imaginez ces mages probablement installés dans une vie confortable, peut-être aussi avec une certaine réputation de sérieux : s’ils veulent voir Jésus, il va falloir risquer leur confort, leur réputation ! Si l’on suppose qu’ils sont vers Babylone, il faut compter environ 900 km de voyage, soit entre 1 mois et 1 mois et demi de voyage en caravane.

Comment expliquer à la famille que vous montez une caravane pour partir à Jérusalem, parce que vous avez vu une étoile qui brille dans le ciel ? « Il a perdu la tête ! » (Mc3,21). Ce qu’on dira de Jésus aussi. Suivre Dieu expose toujours, sinon ce n’est pas Dieu.

Dieu prend soin du voyage. Nous ne savons pas s’ils sont partis ensemble ou non. Peut-être que Dieu leur donnent de se rencontrer sur la route. L’étoile disparaît, leurs ennemis leur rendent service par leur connaissance des prophéties, l’étoile revient : c’est l’aventure, tout n’est pas connu à l’avance. C’est pour ça que c’est bien ! Mais il faut une bonne dose de foi pour ne pas perdre cœur en route, pour ne pas se laisser envahir par la peur de revenir chez soi, misérables de n’avoir pas trouvé le roi.

Quelle place à le risque dans nos vies ? A quelle fréquence sortons-nous de notre zone de confort ? Nous avons là un indicateur de l’authenticité de notre vie de foi.

 

C’est un peu bête, mais moi je me dis : j’espère que Dieu n’est pas en train de faire briller une étoile, car je ne la verrai pas. Je n’ai pas de temps pour les étoiles, pour la gratuité : il faut que les choses avancent, pour ce qui est sérieux. Ces mages ont le temps pour lever la tête, pour guetter ce qui dépasse l’horizon matériel, utile. Ils ont du temps pour ce qui est beau, pour les questions qui habitent leur cœur. Ils ont du temps pour Dieu.

Nous pourrions les prendre pour des scientifiques « purs et durs », mais non, lorsqu’ils décrivent la motivation de leur voyage au roi Hérode, ils sont très précis : « Où est le roi des juifs ? (…) Nous sommes venus pour l’adorer ».

Ces hommes savent très bien pourquoi ils montent une caravane et pourquoi ils prennent tous ces risques. Ils savent ce qui mérite leurs efforts.

Dieu ne les ménage pas. Ces mages arrivent naturellement au palais de Jérusalem : l’endroit attendu. Mais Dieu les conduit devant un bébé, à l’écart dans une crèche. On dirait presque qu’il les teste : « Vont-ils me suivre jusque là ? Vont-ils aussi laisser leurs belles idées pour m’accueillir tel que je suis et non tel qu’ils m’ont imaginé ? ». Quel déplacement intérieur pour reconnaître leur roi dans la vulnérabilité et la tendresse !

Ils ne viennent pas pour faire une demande, ils ne viennent pas d’une manière intéressée. Ils font le trajet, mais ils ont quelque chose à donner plutôt qu’à demander. C’est très très beau ! Ils adorent. (Se prosterner et adorer : ce sont exactement les deux verbes employés pour décrire ce que font les anges et les vieillards au ciel devant le trône de Dieu, devant le roi donc (Ap7,11 par exemple).)

Adorer : c’est s’abaisser devant celui que l’on reconnaît supérieur à soi. C’est lui rendre hommage pour ce qu’il a fait pour nous. Le roi est celui qui fait l’unité, la paix d’un territoire en protégeant des ennemis alentour.

C’est un premier aspect. Mais on entend aussi parfois : « Lui, je l’adore ! ». Adorer Dieu, c’est l’aimer plus que tout. C’est ce que nous voyons chez les mages : ils l’aiment plus que tout, car ils ont goûté comment Dieu est bon. Leur générosité est le signe de cet amour qu’ils ont. Ce ne sont pas des esclaves obligés de s’incliner : l’enfant ne les contraint à rien. Ce ne sont pas des gens intéressés ni des lèches-bottes. Ce sont des hommes mûrs, solides, qui s’abaissent librement : ils accueillent Dieu qui se donnent à eux et ils se donnent à Dieu qui les accueille. Magnifique. Le jeu en valait bien la chandelle.

Pensons à deux amoureux, l’un ose provoquer la rencontre, inviter à aller plus loin : y a-t-il plus grand risque ? Mais y a-t-il meilleure récompense ?

 

De quoi exactement avons-nous soif dans nos vies ? Soif de Le rencontrer ?

Soif jusqu’à prendre des risques pour suivre sa voix, pour le rencontrer ?

Marc Burtschell

Homélie du dimanche 29 décembre 2024

La beauté de l'obéissance à Dieu

Nous avons commencé notre voyage au début de l’Avent avec les mages, et nous allons les retrouver dans une semaine maintenant. Aujourd’hui, nous faisons une halte avec la Sainte Famille pour méditer sur l’obéissance à Dieu, ou si nous préférons la recherche de Sa volonté.

Jésus est exactement où il doit être : à sa place dans la maison du Père pour faire sa volonté. C’est pourquoi il est surpris que ses parents le cherchent.

La question que nous pouvons nous poser est : sommes-nous à notre place nous aussi ? Si l’on nous cherche, va-t-on nous trouver là où nous sommes censés être ? Va-t-on nous trouver présents dans nos familles, impliqués pour accompagner nos enfants, présents à notre conjoint ? Ou bien trop souvent ailleurs ? Va-t-on nous trouver présents à notre travail, engagés sérieusement avec nos collègues ?

 

Nous qui sommes des fils et des filles de Dieu par notre baptême : va-t-on aussi nous trouver dans la maison du Seigneur ? Va-t-on nous voir à la messe ? En train de prier ? Veillant à faire la volonté de Dieu ?

Je constate que certaines personnes ont du mal à venir à la messe tous les dimanches. Je comprends bien que nous soyons pris dans des emplois du temps chargés, avec des sorties avec des amis ou d’autres événements. Mais au-delà du côté pratique, je crois qu’il y a parfois aussi une part de difficulté à assumer pleinement le fait que le Père des cieux passe avant tout le monde.

Il y a de la paix à assumer pleinement notre identité de fils et filles de Dieu. Nous pouvons témoigner un vrai accueil, une vraie joie aux amis avec qui nous sommes par exemple, associé à une présence à la messe tranquille, en expliquant que nous les retrouverons à nouveau après.

Si nous sommes stressés, coincés, si nous avons l’air de nous justifier, alors tout devient plus compliqué. Mais les choses peuvent être simples, quand elles sont assumées intérieurement. Alors nous sommes en paix. Notre vie devient à notre insu un témoignage.

Nous pourrions dire la même chose avec nos temps de prière. Arrivons-nous à établir un rythme de prière, et à le tenir fidèlement ? Dans le film « Tu ne tueras point », un homme se retrouve infirmier car il refuse de prendre les armes et de tuer. On le croit coincé, lâche, jusqu’au jour où il sauve, seul, environ 80 blessés. Quelques jours plus tard, il faut retourner sur le front. Mais les soldats ne veulent pas y aller sans lui, car ils savent bien que s’ils sont blessés, ils auront des chances d’être ramenés. Mais ce soldat pour qui Dieu passe avant toute chose, explique qu’il ne renoncera pas à son temps de prière car c’est le jour du Seigneur. Il y a cette scène incroyable : le commandant est en communication par radio avec le capitaine et lui reproche leur lenteur à se mettre en mouvement. Ce à quoi le capitaine répond qu’ils attendent la fin de la prière du soldat Desmond Doss avant de partir. Ce témoignage authentique a été si puissant qu’il a été porté sur les écrans par ce film à large diffusion. Voilà l’impact de l’obéissance à Dieu !

 

Dans la Sainte Famille que nous fêtons, ils s’entraident les uns les autres à faire cette volonté de Dieu. C’est très frappant. (Inspiré du pape François dans le livre Ma crèche)

Marie avait formé le projet du mariage avec Joseph, mais que Dieu vient, elle n’hésite pas à dire « oui », se disant la « servante » de Dieu. Jésus fera l’éloge de sa mère non pas d’abord pour son rôle de mère, mais pour son obéissance : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! » (Lc11,28).

« Quant à Joseph, l’Évangile ne rapporte aucune parole : il ne parle pas, mais il agit dans l’obéissance. L’ange lui dit de ne pas craindre de prendre Marie, à son réveil, il prend sa femme chez lui. L’ange lui dit de fuir en Égypte, il fuit en pleine nuit. L’ange lui dit de revenir, il rentre. Quel exemple d’obéissance ! Et nous voyons ici qu’obéir, c’est être protégé : autrement Jésus aurait été tué avec les enfants de moins de deux ans !

Enfin Jésus : « en lui, dit saint Paul, il n’y a pas eu « oui » et « non », mais seulement « oui » (cf. 2 Co 1,19). Jésus dira plus tard : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé » (Jn4,34), jusqu’à la croix. L’évangile nous dit que même lui était soumis à ses parents. Il obéit aux autorités de ce monde-ci pas seulement à son Père.

Marie, Joseph et Jésus s’entraident à découvrir le projet de Dieu. Ne redoutons pas cette volonté de Dieu sur nos familles, n’ayons pas peur ! Je crois que par peur de cette volonté nous sommes capables de perdre un temps précieux à faire n’importe quoi d’autres, en pure perte ! C’est le contraire : vivre l’évangile et accomplir cette volonté donne la joie, la paix. Elle consolide les liens familiaux et rend profondément heureux.

Prions que cette Sainte Famille soit le modèle de nos familles pour qu’elles soient le lieu où les enfants et les parents apprennent à reconnaître la volonté de Dieu et s’encouragent à la mettre en pratique.

Marc Burtschell

Homélie du 25 décembre : Noël

Naître au ciel

« C’est par lui que tout est venu à l’existence ». Ce bébé dans la crèche est notre Créateur !

En contemplant la splendeur de la création, de nombreux hommes se sont dit : il existe un Dieu qui a fait tout cela. Et devant une telle beauté, le désir naît en l’homme de rencontrer l’auteur d’un tel cadeau. Qui a fait cela pour moi ? Qui m’offre cette vie que je goûte maintenant, et ces amis, cette famille qui m’entourent, et ces montagnes enneigées ? J’aimerai rencontrer un jour celui qui m’a donné tout cela.

Eh bien, à Noël, cette rencontre a lieu. Aujourd’hui naît dans le monde, le Créateur du monde lui-même ! Toute la vie que nous voyons dans ce monde vient de cet enfant qui est la Vie. Toute la lumière que nous percevons dans ce monde vient de cet enfant qui est la Lumière. Celui qui nous a créés vient pour nous recréer, et nous sauver.

Nous regardons l’enfant dans cet endroit si pauvre, si pauvre. Nous nous redisons : « Ça alors, c’est lui qui nous a créés ! ». Et nous voyons la gloire de Dieu ! C’est-à-dire « le poids de la grandeur de Dieu », en quelque sorte.

Les mots nous manquent, mais je crois que notre cœur saisit bien la gloire de Dieu dans cette crèche ! Il est l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier : il explose complètement tous nos repères. C’est vraiment Dieu celui-là.

Vous voyez : Jésus vient habiter parmi nous, car « Il désire une grande intimité » (pape François, Ma crèche) avec nous, lui aussi !

Savourons sa présence, ouvrons-lui nos cœurs en lui disant ce qui va ce qui ne va pas. Que l’on ne puisse pas dire qu’il est venu chez les siens et que nous ne l’avons pas accueillis !

Noël est le cadeau de la présence de Dieu à nos côtés, pour toujours.

 

Que vient-il faire sur terre ? L’évangile nous donne un indice de plus : « Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu ».

Il est descendu sur la terre pour que nous puissions monter au ciel.

Nous sommes arrivés sur cette terre par notre naissance, c’est ainsi que notre histoire a commencé. C’est aussi par une naissance que nous allons au ciel. Jésus qui était au ciel est né sur la terre pour que nous, nous puissions naître au ciel.

Jésus qui est le Fils de Dieu, vient comme un homme pauvre, pour que les hommes et les femmes qui se reconnaissent pauvres entrent dans la crèche et avec lui, naissent au ciel comme des fils et des filles de Dieu !

La crèche est un ascenseur, si vous voulez.

Nous l’entendions à la fin de cet évangile : « Dieu, personne ne l’a jamais vu : le Fils unique, lui qui est Dieu, lui qui est dans le sein du Père, c’est lui qui l’a fait connaître ». C’est le plaisir de Jésus et sa mission que de nous révéler que Dieu est notre Père, pour que nous puissions reprendre souffle en si bonne compagnie. Car Dieu est un bon Père, exactement celui dont nous avons besoin. Et c’est le plaisir de Jésus que de nous donner sa Mère. La meilleure qui soit. Car il sait que nous avons besoin d’une bonne Mère pour être aidés sur la route, consolés, relevés, rassurés. Et enfin, c’est aussi son plaisir de devenir notre grand frère pour nous montrer le chemin du ciel.

A Noël, Dieu nous donne une famille au ciel. Et il vient sauver notre famille de la terre. Et nous savons tous combien nos familles ont besoin d’être sauvées, car parfois nous n’y croyons plus, les relations deviennent trop compliquées.

 

En contemplant cette crèche, je me disais : Jésus n’a pas peur d’aimer. Il faut être sacrément courageux pour prendre de tels risques. Il descend sur terre, mais il est tellement vulnérable, il s’en remet à Marie, à Joseph, et à ceux qui croiseront leurs routes. Il prend le risque d’être rejeté, mais il sait que d’autres l’accueilleront, comme les bergers. Quel courage pour venir jusqu’à nous et oser nous aimer comme ça, sans soldats pour le protéger. Oser aimer est la plus grande des aventures.

Eh bien, je crois que l’un des grands secrets de Jésus tient justement à ses parents. Il a un Père sûr, et nous le voyons souvent en conversation avec son Père dans la prière. Et il a une mère Immaculée, sans péchés, grâce à qui il se sait parfaitement aimé. Sa personne a été construite sur des bases solides.

Nos bases à nous sont fragiles : mais grâce à Noël, nous pouvons l’imiter.

 

Concrètement, je vous suggère quelques pistes :

1. Savourons la présence de Jésus : j’ai remarqué qu’il y a des personnes qui regrettent d’être seules à Noël, et certaines autres qui sont en famille mais qui préféreraient être seules, et d’autres encore. Luttons contre cette idée que nous sommes seuls !

Dieu est descendu du ciel pour que nous passions Noël ensemble ! Et toute notre vie !

2. Vivons avec Dieu pour Père et Marie pour Mère. Ce n’est pas un hasard si le Notre Père et le Je vous salue Marie sont les deux plus grandes prières des catholiques. Il est si doux d’être en leur compagnie. Quand les choses ne vont pas, et quand les choses vont : parlons-leur de nos vies, comme on le fait avec de bons parents.

3. Aimons les premiers. Ne sortons pas les griffes pendant les repas de famille. Osons rester vulnérables sans nous protéger par mille barrières, qui laissent entendre aux autres que nous n’avons pas besoin d’eux. Et prenons quelques risques : dire une bonne parole, proposer un jeu, oser une réconciliation, etc. Nous ne voulons pas aimer à moitié !

Nous n’avons pas de prise sur ce que nos proches nous diront, ou ce qu’ils feront. Mais pour nous, puisque nous avons goûter à l’amour de Dieu, osons l’aventure de risquer de les aimer en premier.

Marc Burtschell

Homélie du 21 décembre 2024

Des personnes extraordinaires

L’approche de Noël nous plonge de manière particulière dans la grande beauté de l’histoire du salut. Connaissez-vous beaucoup d’histoire qui s’étendent sur aussi longtemps et avec une telle magie, comment dire ? La première lecture par exemple témoigne de la promesse faite par Dieu par son prophète Michée. C’était quand ? Michée est mort en 687 av. J.C. Les juifs sont les garants que les textes que nous possédons n’ont pas été trafiqués. Et je vous rappelle l’annonce étonnante que contient ce texte : annonce d’un chef qui naîtra du clan de Juda. Jésus naît dans la lignée de Joseph du clan de Juda. Et que précise ce texte à propos de ce chef : « Ses origines remontent aux temps anciens, aux jours d’autrefois. » Intéressant : à l’époque, il y avait de quoi se demander ce que cela pouvait bien signifier. Mais nous qui connaissons Jésus qui est Dieu, nous réalisons que cette phrase s’applique admirablement : car Jésus était même avant toute origine, le plus ancien que l’on puisse imaginer, hors du temps, « l’alpha et l’oméga ».

 

Nous voilà donc plongés dans une histoire extraordinaire commencé il y a bien longtemps avec Abraham, avec Adam et Eve. Dans l’évangile, nous voici à une nouvelle étape de l’histoire avec la rencontre de ces deux femmes au destin extraordinaire : Marie et Elisabeth. Regardez comme Dieu conduit toute chose : Marie qui ne dit rien du secret qu’elle porte, Marie qui a de quoi se demander si elle n’a pas rêvé avoir vu un ange, tant l’annonce est grandiose, voilà que Dieu lui donne une cousine qui comprend par son fils qu’elle porte le messie. Et voilà que les deux femmes sont dans la joie l’une pour l’autre, se soutiennent l’une l’autre, s’encourage l’une l’autre. Voilà comment Dieu agit : il tient le monde dans sa main, et ceux qui se laissent conduire en font l’expérience. En temps et en heure, l’Esprit Saint trace sa route.

Ces vies extraordinaires font envie non ? Moi, oui. Et c’est là que j’ai réalisé, en fait nous avons nous aussi une vie extraordinaire avec Dieu ! Cette histoire est la nôtre : il n’y en a pas plusieurs.

Nous pourrions penser, peut-être, mais enfin Marie c’est tout de même Marie, et puis Elisabeth ce n’est pas n’importe qui non plus, alors que moi… Oui. Et en même temps, à y regarder de près, Marie n’est pas la figure principale, c’est Jésus : elle est seulement sa mère. Elisabeth n’est pas vraiment au centre, c’est Jean-Baptiste qui est plus au centre, et encore Jean-Baptiste n’est rien en comparaison du Christ.

 

Qui a la vedette alors ? Le Christ. Mais nous sommes tous articulés par rapport à ce dessein de Dieu, nous sommes tous pris dans des liens : il y a le prophète, la mère du prophète, la mère du Messie et si l’on élargit Joseph, le père adoptif, et puis tel apôtre, telle disciple.

Dieu s’intéresse à chacun de nous. Pour nous-mêmes et dans les liens que nous avons avec les autres. Elisabeth est Elisabeth avant d’être « la mère de ». Et puis il y a tous ces liens, et il est un peu inutile de chercher qui a la première place, car la première place est prise (et c’est même plutôt une dernière place).

Que ferait le prophète sans sa mère ? Sans la mère, pas de prophète : essayez donc après ça de dire qui est le plus important !

Ainsi, afin que le salut parvienne à beaucoup autour de nous, nous avons à la fois une responsabilité personnelle et communautaire. Chacun doit prendre sa part. Mais il ne doit pas le faire seul : le salut dépend aussi des liens que nous aurons su tissés entre nous. C’est l’expérience de ceux qui étaient réunis ensemble pour le synode, ils ont pris conscience d’une manière nouvelle de cette très belle vérité, et ils ont écrit : « En vivant le processus synodal, nous avons pris conscience que le salut à recevoir et à proclamer passe par les relations. » (Synode sur la synodalité)

En étant disponible à l’Esprit de Dieu, peut-être que nous ne ferons que dire : « Oh viens, je t’invite à une fête chez nous les chrétiens », et la personne se retrouve à la messe de Noël, et c’est le début d’un cheminement de foi. (C’est ce qui est arrivée à quelqu’un invité de cette façon à la veillée pascale).

Si Marie ne s’était pas mise en route, Elisabeth n’aurait rien su. Mais regardez aujourd’hui, malgré tous les grands saints qui nous précèdent, si nous ne portons pas le Christ à notre voisin, cette histoire sera vaine ! Pour notre voisin, au cœur de nos familles, notre importance est plus grande encore que celle des grands saints de l’Église.

Ou plus exactement, il arrive un moment où il est peut-être inutile de vouloir savoir qui dans ce jeu collectif a été plus ou moins important, car tous ont compté. Tous, nous compris !

 

Je ne sais pas si vous connaissez ce grand classique de Noël, le film La vie est belle de Franck Capra (pas celui qui se passe dans un camp de concentration). C’est l’histoire d’un homme, Georges Bailey, qui s’apprête à se suicider en se jetant dans la rivière. Mais son ange gardien reçoit la permission de Dieu de descendre sur la terre pour le sauver. Et son ange gardien a l’idée de se jeter à l’eau comme quelqu’un qui serait en train de se noyer. Car il se doute que son protégé se jettera à l’eau pour le sauver. Effectivement Georges le sauve, mais il reste déprimé et dit quelque chose comme « il aurait mieux valu que je n’existe pas ». Ce qui donne une idée à son ange gardien : que son protégé puisse voir le monde comme s’il n’avait jamais existé. Ainsi Georges se promène dans la ville : il voit que sa femme est devenue une célibataire triste, que les personnes qu’il a aidé par son travail juste n’ont pas été aidé et vivent dans la misère car son concurrent malhonnête a profité d’eux, etc.

 

Je vous propose cet exercice : regardons nos vies, prises dans ce dessein de Dieu, à son service. Et demandons-nous : cette année si je n’avais pas été là, qu’est-ce qui aurait manqué ? Qu’est-ce qui n’aurait pas eu lieu ? Posons-nous la même question avec l’une ou l’autre personne très proche de nous.

Et réjouissons-nous de ce que chacun apporte, car c’est au service de tous. Comme Marie et Elisabeth se réjouissent l’une pour l’autre de ce que Dieu fait par elles, pour le monde.

Marc Burtschell

Homélie du 14 décembre 2024

Soyez dans la joie !

Nous sommes aujourd’hui le dimanche de Gaudete, c’est pourquoi je suis en rose : c’est le dimanche de la joie ! Gaudete signifie : « réjouissez-vous », ces mots de la deuxième lecture.

Je ne sais si je me trompe, mais je crois que souvent nous courrons le risque que ça ne change rien pour nous. Nous risquons de penser : « Je sais que je devrai être joyeux parce que Dieu est ma joie, etc. Mais je ne suis pas joyeux, qu’est-ce que j’y peux ? Inutile de me mettre la pression ! »

Alors j’aimerai vous montrer que non, nous pouvons bel et bien devenir plus joyeux. Si Dieu nous donne le commandement d’être « toujours dans la joie du Seigneur », c’est que la joie est un choix et que ce choix est possible.

 

En préambule, remarquons que dans la Bible, quelque passage nous montre que la joie n’est pas toujours bien vue dans la religion. Les pharisiens s’offusquent devant la louange de la foule pour Jésus, ils voudraient que Jésus les fasse taire, mais il répond « Si eux se taisent, les pierres crieront ! » Lc19,40

Dans la parabole du fils prodigue, c’est semblable : lorsque le fils cadet revient, le père organise la fête, avec le veau gras, la musique et les danses.

Vous réalisez ? Ce père est une image du Père des Cieux ! Dieu aime la fête ! Mais le fils aîné est en colère. Alors le Père est obligé de le reprendre en lui expliquant « qu’il fallait bien faire la fête et nous réjouir » pour le retour de son frère.

Il faut se réjouir, nous avons des raisons de nous réjouir ! Encore plus à l’approche de Noël.

 

Est-ce que notre paroisse est réputée pour ses fêtes ? Est-ce que pendant les chants à l’Église, nous pouvons facilement taper des mains, danser ? Hum, franchement, nous savons que non. Nous passons des bons moments je ne dis pas. Mais si on veut faire la fête, on va ailleurs. On n’ose pas exprimer vraiment notre joie, une exultation profonde, qui est pourtant souvent exprimée dans la Bible.

Quelque part, nous croyons qu’il faut être sérieux. Ça fait bien d’être sérieux ! Eh bien non, encore un domaine où les enfants ont vraiment à nous apprendre. L’une de mes nièces n’avait pas encore 10 ans, elle écrivait déjà qu’il faut chanter pour aller bien quand ça va mal. Bien vu !

 

J’avais envie de commencer par cette introduction avant d’aller plus loin.

Comment donc devenir joyeux si nous le sommes pas ? Je reviens à la question.

« La joie est une émotion. Nos émotions sont dictées par les pensées que nous entretenons à l’intérieur de nous, conscientes ou inconscientes. » (David Théry)

Lorsqu’il y a la tristesse c’est que nous ne faisons pas vraiment confiance à Jésus qui nous demande dans cette deuxième lecture : « Ne soyez inquiets de rien » (Ph4,6).

Si par exemple, je fais une tête d’enterrement en préparant les fêtes de Noël, en m’inquiétant des repas, des cadeaux, des relations avec les gens que je vais revoir. J’ai beau dire : j’ai confiance en Dieu. Non, c’est faux. La tête que nous faisons, l’absence de sourire, trahit que nous ne faisons pas confiance.

Comment entrer dans la joie ? En choisissant de faire confiance aux promesses de Dieu « au point que nos émotions anticipent l’accomplissement de ses promesses. Tant que nos émotions ne sont pas alignées avec ce que nous prétendons croire avec notre tête, c’est que notre cœur ne le croit pas encore. »

 

« Si donc vous voulez être plus joyeux, vous devez décider de penser ce que Dieu pense. Vous ne savez pas ce que Dieu pense sur un sujet ? Lisez la Bible et posez la question au Saint-Esprit ? »

C’est la première étape.

 

La deuxième étape c’est de faire ce que Dieu dit. Or, dans la Bible, Dieu dit : « chante et danse pour ton Dieu », frappe des mains, joue sur les instruments, sur la lyre et la cithare.

Quand nos corps se mettent à le faire, notre âme est aidée à entrer dans la joie elle aussi.

La louange change les perspectives. Elle nous aide à voir les épreuves comme des opportunités, ou comme l’occasion pour Dieu de montrer sa puissance.

Cette expression d’une confiance absolue en Dieu aide à lutter contre le stress et l’inquiétude. Elle attire les bénédictions de Dieu sur nous.

Nous pourrions peut-être penser : si je ne suis pas dans la joie, je ne vais pas louer Dieu en chantant. Mais si pourtant, c’est exactement ce qu’il faut faire ! Vous restez maître de vous-mêmes en refusant de vous laisser dicter votre état intérieur par les circonstances de votre vie.

Vous mettez de la musique chrétienne de louange, ou bien vous chantez, vous jouez d’un instrument, vous dansez, et petit à petit vous allez entrer dans la joie.

 

Dans les années 80, un livre avait eu un très grand succès : La puissance de la louange, de Merlin Carothers. Elle exprimait le choix de louer en toutes circonstances et même de louer pour les épreuves et de comment les situations changeaient parfois presque miraculeusement. Sentez-vous le renversement de situation complet en vous ? « Oh, j’ai peur, ça ne marchera jamais, etc. » à « Mais avec Dieu je n’ai peur de rien ! Seigneur, je compte sur toi dans ces rencontres, et je te remercie ». Le démon rôde autour de la première personne, mais il a compris qu’il n’a plus qu’à fuir face à la deuxième.

Je me souviens dans un film chrétien, un passage qui m’avait marqué (et qui semblait bizarre à certains) : une femme inquiète pour la situation de son couple se met à parler à voix haute dans son salon pour dire son refus de rester dans la tristesse, elle commandait au démon de partir et à la tristesse avec, et elle redisait avec force le fait que Dieu est le maître de sa vie, de sa maison et que la joie règne sur sa maison. Même en film, on sentait toute l’atmosphère changer.

Cela nous appartient ! C’est la foi qui est mise en œuvre, et qui nous donne la joie. Demandons à Dieu cette grâce là. Remercions-le d’être le Dieu de la joie !

(Homélie inspirée du livre de David Théry, « Joie surnaturelle, Dieu rit et vous ? »)

Marc Burtschell

Homélie du 30 novembre 2024

Dieu fait toutes choses nouvelles

L’image qui me vient en entendant cet évangile est une image qui vient de tous ces films qui ont un thème si proche : une image d’apocalypse où le mal règne, où les méchants agissent au grand jour car ils se croient les maîtres indétrônables, et ils en profitent pour de multiples exactions. Et vient soudain le héros de l’histoire qui vient pour sauver le monde, dans une grande lumière. Alors les rapaces s’envolent, les méchants tremblent et fuient lâchement, loin dans les cavernes pour essayer se mettre à l’abri de celui qui les surpasse infiniment en puissance et en noblesse.

C’est ainsi que notre histoire se terminera, et que le paradis commencera. Vivement !

Chaque messe, c’est ce que nous disons : vivement ! « Nous annonçons ta mort, Seigneur Jésus, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire. » « Viens Seigneur Jésus ! ».

 

Dieu fait toutes choses nouvelles !

 

Quel rapport entre ces temps de l’apocalypse et le temps de l’Avent qui commence aujourd’hui ? Comme le peuple de l’Ancien Testament, nous attendons nous aussi que Dieu intervienne dans l’histoire, notre salut dépend de lui ! A Noël, c’est la première venue que le peuple hébreu attendait. Nous attendons désormais le retour du messie, avec la fin du mal. (Et chose surprenante, nous attendons ce retour en commun avec les musulmans. Eux aussi attendent le retour de Jésus, même si pour eux, ce n’est qu’un prophète.)

 

Mais dans l’un et l’autre cas, c’est une question semblable qui est posée : crois-tu que Dieu va faire du nouveau ? Crois-tu qu’il est en train de le faire ?

Ou bien, ne crois-tu rien et n’attends plus rien, car les ténèbres ont rempli ton âme ? En effet, ce texte nous met en garde contre la puissance des ténèbres : nous avons donc besoin de nous entraîner.

Cela se joue dans le futur : quelle est notre espérance ? Est-ce le bien qui vient ?

Mais cela s’ancre dans le présent, avec cette question toute simple : attendons-nous du bien pour aujourd’hui, pour ce soir ?

Vous savez certaines personnes se lèvent en se demandant : « quelle va être la tuile que je vais me prendre aujourd’hui ? ». Eh bien, personnellement, ça me fait beaucoup de bien de commencer mes journées en disant : « Je crois et je proclame que Dieu m’offre la vie, la vie en abondance ! ». Ça me positionne autrement.

Je me lève et je me souviens que comme nous le dit la Bible : « Ses tendresses ne s’épuisent pas ; elles se renouvellent chaque matin » (Lm3,22). Si la Bible le dit, c’est que c’est vrai.

 

Nous sommes tentés de voir ce qui va mal, et de voir le mal qui progresse. Mais souvenons-nous : « un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse ». Apprenons à voir les signes de la présence de Dieu : son Royaume grandit sans cesse, comme le levain dans la pâte, discrètement, mais réellement.

 

Voici donc la double proposition que je vous fais pour ce temps d’Avent : apprenons à voir Dieu à l’œuvre, et à attendre son action qui ne saurait tarder.

Pour la première :

Prenez un carnet de gratitude : un simple carnet sur lequel chaque soir, vous écrivez toutes les belles choses que Dieu vous a données de vivre. C’est pour nous entraîner à voir. Cette disposition d’action de grâce change notre manière de vivre, certaines études le prouvent si vous avez besoin des scientifiques pour vous convaincre !

C’est une attitude profondément chrétienne, puisque le sens du mot eucharistie, signifie rendre grâce, donc gratitude. (Parcours Gratitude à l’adresse suivante : https://lpmiracledelagratitude.kinsta.cloud/)

 

La deuxième piste que je vous propose : attendez les bonnes choses que Dieu va faire.

Sur ce même carnet, vous écrivez vos intentions de prière précises, et avec foi « vous vous attendez à Dieu » (comme disent les protestants).

Un exemple récent : j’étais en retraite la semaine dernière. Et l’homme qui s’occupe de l’accueil des hôtes nous dit que le mauvais temps est prévu pour le lendemain. Alors dans ma prière, je demande à Dieu le beau temps quand même. Je lui dis : « pendant la nuit, d’accord, mais pas pendant la journée s’il te plaît ! ». Et au réveil, il pleuvait légèrement. Mais pendant que j’étais à l’Abbaye pour le premier office du jour, je me disais : « il fait encore nuit, donc la pluie a encore le temps de s’arrêter ». Et effectivement, en sortant, grand ciel bleu jusqu’à la fin de la journée : alors j’ai eu un grand sourire et j’ai remercié Dieu.

Vous vous dites : il a eu de la chance. Très bien, vous n’êtes peut-être pas convaincu. Vous savez quoi, vous avez besoin d’en faire l’expérience vous-mêmes ! Eh bien je vous en prie, c’est ma proposition. Faites des demandes précises à Dieu, au lieu de laisser le temps passer sans avoir eu une demande pour que Dieu intervienne.

Marc Burtschell