Se former ?
Aimer avant de comprendre (ou tout en comprenant)
Ils sont nombreux ceux et celles qui, ayant vécu une expérience spirituelle, éprouvent un besoin de formation afin de pouvoir mettre des mots sur cette réalité existentielle. Ce qui a précédé leur entendement, appelle à un travail intellectuel pour refaire cette unité de toutes les dimensions de leur personne, mise à mal par cette sorte de motion mystique semblant aller seule son chemin. Ce travail de mise en mots, ou en concepts, leur permettra, en outre (en plus de leur unité retrouvée), de rendre compte de cette nouvelle dimension de leur existence, devenue pour eux si centrale qu’ils voudraient vraiment la faire partager.
Il ne faudrait pas oublier cependant qu’une expérience, mystique, comme une expérience esthétique ou sensible, ne peut pas être reproduite, ou partagée avec un autre, en vertu d’une simple démonstration. L’existence de Dieu ne se prouve pas, elle s’éprouve. Toute formation, quand bien même elle serait universitaire et de très haut niveau est, par elle-même, incapable de provoquer la foi en un Dieu qui n’est pas une idée, mais une personne.
Un riche parcours de formation intellectuelle, philosophique, exégétique, théologique, risquerait d’être quelque chose de totalement vain, si au préalable ou en parallèle, on ne se souciait pas de favoriser la rencontre de Celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie. Notre première responsabilité est celle de l’accompagnement spirituel qui nous fait dire à un proche : « viens et vois ». Cela peut ouvrir des possibles pour tous ces chercheurs de sens qui, un jour peut-être, seront rejoints sur leur route, comme les pèlerins d’Emmaüs, par Celui qui les éclairera et leur donnera soif de se former.
Pas de connaissance sans amour donc, comme nous le rappelait si bien Pascal (à la suite de Denys l’Aréopagite ou d’Augustin) : « Et de là vient qu’au lieu qu’en parlant des choses humaines on dit qu’il faut les connaître avant que de les aimer, ce qui a passé en proverbe, les saints au contraire disent en parlant des choses divines qu’il faut les aimer pour les connaître, et qu’on n’entre dans la vérité que par la charité, dont ils ont fait une de leurs plus utiles sentences » (Blaise Pascal - dans L’art de persuader).
+ Jean-Marc Eychenne